Le perfectionnement professionnel

La course aux diplômes

extrait entre nous mai 1974Au moment de la fondation de l’AEFO en 1939, l’École normale de l’Université d’Ottawa existe depuis une douzaine d’années. Si plusieurs enseignantes et enseignants des écoles de langue française sont diplômés de ce programme de formation postsecondaire d’un an, bon nombre n’ont pas de qualifications en enseignement. Le problème est exacerbé par le fait que le ministère de l’Éducation n’impose pas aux francophones des conditions d’entrée à l’École normale aussi sévères qu’aux anglophones et qu’il émet régulièrement des « lettres de permission » à des personnes non qualifiées pour pallier la pénurie de personnel enseignant.

Pour l’AEFO, l’avancement professionnel de ses membres constitue un enjeu de première importance pour l’avenir de l’éducation de langue française. L’Association est d’avis que l’accroissement des qualifications professionnelles des enseignantes et des enseignants francophones rehausse leur statut dans la société. De plus, il augmente la légitimité des écoles françaises en mettant sur un pied d’égalité les enseignantes et les enseignants franco-ontariens avec leurs homologues anglophones et dément la croyance populaire voulant que les écoles françaises offrent un enseignement inférieur à celui des écoles de langue anglaise.

cours ete 1958En 1959, la Fédération des enseignantes et des enseignants de l’Ontario préconise une échelle de salaires basée sur un système de points accordés en proportion des qualifications. Les qualifications ne sont plus seulement une question de compétence; elles sont déterminantes pour le salaire.

L’AEFO entreprend donc des démarches pour inciter le Ministère à abolir la formule selon laquelle trois cours d’été consécutifs suffisent pour se qualifier. Elle souhaite que cette formule ne soit tolérée que pour les enseignantes et les enseignants qui font carrière depuis longtemps et pour qui il est impensable de retourner sur les bancs d’école. Pour les aspirantes et aspirants à la profession, la seule voie acceptable doit être l’École normale, avec les mêmes conditions d’admission que pour les anglophones.

Extrait du discours de la présidente de l’AEFO, Marie Duhaime, au congrès de 1961.
« Il est grand temps que notre Association considère comme persécution sourde ce que certains groupements francophones tiennent pour des faveurs, c’est-à-dire accepter des qualifications moindres pour notre groupe ethnique. »

membres aefo stage quebec 1988Avec les années 1960, s’ouvre donc une grande « course aux diplômes ». L’AEFO, avec l’aide d’autres organisations éducatives franco-ontariennes, utilise tous les moyens dont elle dispose pour inciter ses membres à poursuivre leurs études ou à se perfectionner. Les unités régionales de l’AEFO sont chargées de mettre sur pied un comité d’avancement professionnel pour promouvoir des cours de perfectionnement.
Un grand nombre d’enseignantes et d’enseignants consacrent une partie de leurs vacances estivales à la formation professionnelle, comme en témoigne cette photo de groupe prise sur les marches de l’École normale d’Ottawa, en 1958.

L’AEFO revendique éventuellement auprès du ministère de l’Éducation que le programme de l’École normale soit de deux ans et demi, qu’il satisfasse aux mêmes exigences qu’un cours préuniversitaire et que les octrois soient versés aux conseils scolaires en fonction de la compétence des enseignantes et des enseignants.

Cette « course aux diplômes » est solidement empreinte de considérations politiques selon lesquelles la reconnaissance de certaines revendications comme la création d’écoles secondaires de langue française passe par le rehaussement professionnel du corps enseignant francophone.

Les colloques provinciaux

colloque situation francais cornwall 1956 aÀ compter de 1953, l’AEFO organise – et c’est la grande réussite de cette période – un colloque annuel qui devient la manifestation pédagogique et culturelle de l’année, et qui témoigne du sérieux et de la vigilance avec lesquels l’Association envisage ses responsabilités professionnelles et sociales.

La question de la transmission de la culture et de langue françaises est au cœur des colloques. Par exemple, le colloque de 1963 sur « Les langues d’enseignement » a joué un rôle certain dans la francisation du système scolaire. Parmi les autres thèmes abordés lors des colloques, notons « La situation du français dans la province de l’Ontario » (1956), « La langue parlée : bastion de la survivance » (1964) et « L’école franco-ontarienne de demain » (1966), ou encore celui du premier colloque en 1953 « Éducation pour des fins culturelles ou utilitaires », et du dernier en 1977, « Les arts d’expression chez les élèves franco-ontariens ».

colloque situation francais cornwall 1956 bCes rencontres, qui ont regroupé des milliers d’éducatrices et d’éducateurs, ont apporté une contribution importante à la réflexion sur la langue et la culture françaises dans le contexte de l’enseignement.

La fin des colloques provinciaux en 1977 reflète le changement de cap de l’AEFO qui, tout en continuant de se préoccuper de questions pédagogiques, s’investit davantage dans le travail de représentation et de défense de ses membres.

Un article du journal LeDroit rend compte du 6e colloque de l’AEFO, sur le thème « Civisme et éducation », tenu à Hawkesbury, en février 1958.

Les qualifications en enseignement religieux

L’enseignement religieux dans les écoles de langue française est un autre enjeu auquel s’est intéressée l’AEFO. Au début des années 1970, l’AEFO tente de faire approuver par le ministère de l’Éducation un nouveau programme de catéchèse couvrant tous les niveaux, y compris celui de l’École normale afin d’assurer la formation de personnel qualifié dans cette matière. Rappelons qu’à cette époque, la communauté franco-ontarienne tente de faire étendre les garanties concernant l’enseignement religieux aux écoles secondaires publiques nouvellement créées.

L’AEFO travaille de concert avec l’Ontario English Catholic Teachers’ Association pour faire reconnaître, par des crédits, les cours d’éducation religieuse au secondaire. Elle obtient que les Écoles normales de l’Université d’Ottawa et de l’Université Laurentienne de Sudbury créditent les cours d’éducation religieuse que suivent les étudiantes et étudiants en formation initiale.

En 1978, l’AEFO est accréditée par le ministère de l’Éducation de l’Ontario comme fournisseur de cours de qualifications additionnelles en enseignement religieux. Grâce à cette accréditation, les enseignantes et enseignants qui suivent ces cours peuvent désormais les faire reconnaître aux fins de qualifications et de salaire.

Pendant 32 ans, l’AEFO, en partenariat avec ce qui est aujourd’hui l’Association franco-ontarienne des conseils scolaires catholiques (AFOCSC) et l’Office provincial de l’éducation de la foi catholique de l’Ontario (OPECO), assume la responsabilité de coordonner les cours de qualifications additionnelles en enseignement religieux dont les conseils scolaires catholiques font une condition d’emploi. Entre autres, l’AEFO recrute des formatrices et formateurs et émet les attestations requises pour l’évaluation. Dès que la technologie le permet, l’AEFO s’assure aussi que les cours soient offerts à distance ou en ligne.

En 2010, l’AEFO transfère cette responsabilité au Centre franco-ontarien de ressources pédagogiques (CFORP).