La gestion scolaire
Les dirigeantes et dirigeants de l’AEFO, et bon nombre d’autres organisations franco-ontariennes, interprètent la création des écoles secondaires publiques de langue française comme une première étape vers la gestion de leurs institutions éducatives. Or, dans les années 1970, une question fort épineuse fait son apparition et constitue un enjeu de première importance : les écoles mixtes. Dans plusieurs communautés, les conseils scolaires se contentent de créer des modules de langue française à l’intérieur des écoles secondaires publiques de langue anglaise.
Or, l’atmosphère linguistique dans ces écoles contribue à l’anglicisation des élèves francophones et retarde leur apprentissage. À la fin des années 1970, l’AEFO martèle un discours qui clame le droit à des écoles « homogènes » de langue française afin de s’assurer qu’elles ne deviennent pas des écoles d’immersion. De plus, au congrès des États généraux de l’ACFO de 1978, l’AEFO réclame la création de conseils scolaires francophones là où la population le demande.
Nouvelles crises scolaires
À la fin des années 1970 et au début des années 1980, de nouvelles crises scolaires éclatent à Geraldton et Longlac, Burlington, Kirkland Lake, East York, Windsor et, sans doute la plus célèbre, Penetanguishene. Ces luttes posent toute la question de la gestion scolaire des institutions francophones qui apparaît comme le meilleur moyen de garantir aux Franco-Ontariennes et aux Franco-Ontariens une éducation dans leur langue maternelle particulièrement au secondaire. Un tournant est atteint, en 1982, avec l’adoption de la Charte canadienne des droits et libertés qui offre de nouvelles perspectives pour les revendications scolaires de la communauté franco-ontarienne, particulièrement l’article 23 qui garantit le droit à l’instruction dans la langue de la minorité officielle. De nombreux leaders franco-ontariens interprètent l’article 23 comme un droit à la gestion scolaire de leurs écoles.
L’AEFO devant les tribunaux
En 1984, l’AEFO, de concert avec l’Association canadienne-française de l’Ontario (ACFO) et des parents de Penetanguishene, Wawa, Mattawa et Iroquois Falls, intente une poursuite contre le gouvernement devant la Cour d’appel de l’Ontario. Les francophones invoquent l’article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés pour réclamer deux choses : d’une part, le droit des francophones à des écoles secondaires de langue française partout dans la province sans l’exigence du « là où le nombre le justifie » imposé par la loi ontarienne et, d’autre part le droit de la communauté francophone de gérer elle-même ses institutions scolaires.
Le jugement rendu la même année est favorable aux plaignants, le tribunal jugeant inconstitutionnelles certaines dispositions de la Loi sur l'éducation de la province.À la suite de ce jugement, le gouvernement ontarien adopte, en 1986, la Loi 75 qui prévoit la création de sections de langue française au sein des conseils scolaires à prépondérance anglophone. La loi est nettement insuffisante pour l’AEFO qui propose plutôt la création de conseils homogènes de langue française comprenant une section catholique et une section publique. Deux préoccupations sont à l’esprit de l’AEFO : d’une part, un regroupement optimal des effectifs et des ressources pour les francophones et, d’autre part, le respect des choix des collectivités pour un enseignement public ou catholique.
Premiers conseils scolaires de langue française
En 1988, deux conseils scolaires homogènes de langue française sont créés à Toronto et Ottawa, suivis par celui de Prescott-Russell en 1992. L’AEFO rappelle qu’il s’agit d’une première étape vers la gestion scolaire complète pour la communauté franco-ontarienne et continue de réclamer que la province se conforme au jugement rendu par la Cour d’appel en 1984.
Toutefois, ni le gouvernement libéral de David Peterson, ni celui du néo-démocrate Bob Rae, ne prendra les mesures législatives nécessaires pour donner pleine force de loi à ce jugement. Paradoxalement, c’est le décrié gouvernement conservateur de Mike Harris qui créera, avec sa Loi de 1997 réduisant le nombre de conseils scolaires, des conseils scolaires de langue française partout dans la province. Ces conseils, quatre publics et huit catholiques, voient le jour le 1er janvier 1998.
Deux principes commandent les politiques de l’AEFO en matière de gestion scolaire : l’accès à une éducation de langue française et l’autonomie des acteurs scolaires. L’AEFO n’a jamais privilégié un système scolaire plus qu’un autre laissant les décideurs politiques, les communautés et les parents libres de leur choix pourvu que l’accès à l’école française soit assuré.
Pour favoriser la démocratie scolaire naissante, l’AEFO encourage la mise en place des conseils d’école, constitués des parents, des enseignantes et des enseignants, ainsi que des membres de la collectivité, dont la tâche consiste à donner des avis à la direction d’école et, le cas échéant, au conseil scolaire, sur des questions touchant les programmes d’éducation et le fonctionnement d’une école particulière. Au moment des élections scolaires, elle encourage aussi ses membres à se prévaloir de leur droit de vote.